lundi 31 mars 2014

Fu Baoshi, la subversion de l'encre

Fu Baoshi, Yan'an 1964, Pékin

Peintre très attaché à l'idéologie communiste et au Parti, Fu Baoshi réalise de nombreuses œuvres célébrant la grandeur et la particularité chinoise. Ici, il représente un paysage typiquement chinois, son thème de prédilection. Mais il y a des traces anthropomorphiques dans le paysage, comme une construction sur le flanc de la première montagne à droite, ou le petit village dans la vallée à gauche, ou la tour sur la montagne, en haut de la toile. Ce paysage est rattaché à Yan'an, lieu de pèlerinage depuis la Longue Marche de Mao, en 1934. C'est à Yan'an qu'a été fondé un véritable refuge pour les militants communistes, pendant la guerre civile et la seconde guerre mondiale.
Un premier contraste saisissant est celui qui oppose deux couleurs, le noir et le rouge. Les premiers plans sont peints à l'encre noire, c'est-à-dire les feuillages au premier plan, puis les deux montagnes sur la droite, mais aussi les arbres qui s'enfoncent dans la vallée au fond à gauche. L'encre rouge, quant à elle, sert à la troisième montagne et au lointain qui se perd, de moins en moins saturé. Mais comme le noir s'enfonce dans le rouge de la vallée, le rouge se mêle au noir en recouvrant le sommet de la deuxième montagne.
Sous ces deux couleurs, le blanc du support papier est laissé visible, ce qui permet un jeu d'opposition entre l'espace vide et l'espace que remplissent les couleurs. Cette blancheur acquiert cependant une véritable présence, paraissant même se superposer aux encres comme une brume qui cache les couleurs sur les flancs des montagnes et le paysage éloigné avant d'occuper tout le ciel. A ce dialogue entre plein et vide répond celui entre précision et flou. Si les feuillages qui se dressent entre le spectateur et le paysage ont des contours nets et fins, la substance des montagnes est plus délayée. L'encre désigne la surface des choses, leur étendue, tout en étant plus dense ponctuellement.

La remise en question du statut traditionnel de l'encreSi la couleur existe tout au long de l'histoire de l'art chinois, la tradition lettrée a donné à l'encre un statut particulier. Cette pratique, mise en place à l'époque Song, trouve dans l'usage de l'encre de multiples possibilités pour exprimer l'infinie subtilité des tons et la spontanéité de la création méditative. Or, à partir du XIXe siècle, un mouvement artistique général cherche à dépasser les pratiques lettrées traditionnelles pour renouveler la peinture chinoise, ce qui passe notamment par un retour de la couleur. Fu Baoshi utilise ici le rouge de la même façon qu'il utilise le noir, niant tout rapport hiérarchique entre l'encre et la couleur. « Employée en harmonie ou concurremment avec le noir de fumée, la couleur représente une conquête majeure des artistes modernes. » (E. Janicot « La naissance de l'art moderne chinois 1911-1949 ») La couleur rouge, réservée ici à la partie plus lointaine du paysage et à l'horizon, semble être ce à quoi aspire la spectateur, séparé d'elle par les feuilles incisives à l'encre et les deux premières montagnes grises. Pourtant, ces deux couleurs ne semble pas s'opposer, elles s'interpénètrent, le rouge se mêle à l'encre noir délayée en haut de la deuxième montagne, et le noir caractérise les éléments de la vallée entrant dans le paysage rouge du fond.


La couleur et le vide, des rythmes distanciateurs qui s'allient dans l'espace pictural

Le vide interstitiel occupe une grande place dans la peinture traditionnelle chinoise, permettant aux tracés à l'encre de respirer, d'avoir leur rythme propre. Ce vide correspond à la surface du support, laissée vierge, un havre de non-figuration où la pensée dérivée de l'oeuvre même peut s'épanouir. Or, cette œuvre de Fu Baoshi, suivant les inclinations modernes, subvertie cette esthétique du vide. « Il n'est plus le souffle qui anime les traits de pinceau et facilite l'interpénétration des éléments constitutifs du paysage. » (E. Janicot « La naissance de l'art moderne chinois ») En effet, si la surface du papier est visible en de nombreux endroits, elle n'est plus à comprendre comme espace vierge de pensée potentielle reliant les différentes parties de l'oeuvre. Au contraire, ces espaces blancs apparaissent ici imposer un rythme particulier. L'encre de Fu Baoshi est très diluée, étendue, remplie les espaces qui se rejoignent entre eux sans laisser à la méditation la possibilité de se perdre dans des trous de non-figuration. Les espaces blancs représentent une très faible partie de la surface totale de l'oeuvre, appelant plus qu'autre chose à être compris et interprété comme une brume couvrant les choses représentées. Cette couleur du ciel descend sur la terre sous forme de lambeaux évanescents, comme des morceaux de nuages escamotant l'encre à notre vue et descendant dans la vallée le long des montagnes. Cette vision du vide comme brume cachant les couleurs et les formes justifie même l'emploi de tons plus clairs, comme pour les feuilles à gauches, alors qu'ils servent traditionnellement à indiquer le seul éloignement. Ici, ce repère des tons pour distancier est mis à mal. Les feuilles à gauche au premier plan sont aussi diluées que les montagnes du fond. Le rôle d'indicateur de distance semble ici dévolu à la couleur rouge. En effet, le paysage passe progressivement au rouge en s'éloignant du promontoire d'où part le regard du spectateur.

La couleur entre symbole et dynamisation du regard

Fu Baoshi se serait inspiré d'une expérience visuelle personnelle : le spectacle de l'aurore sur Yan'an. Mais le rouge désignant le commencement d'une ère nouvelle s'associe au rouge du communisme et au rouge comme symbole chinois du bonheur. Ces trois dimensions se retrouvent bien dans le mythe fondateur du Parti qu'est Yan'an. L'apport occidental dans la peinture moderne chinoise peut ici être souligné, puisque par opposition à ce rouge tri-symbolique le noir peut être associé à l'obscurantisme impérial et républicain. Dans ce cas, la partie du paysage la plus proche de nous, à l'encre noir, désigne le chemin à parcourir vers le communisme, faisant évidemment écho à la Longue Marche, la traversée d'une Chine obscurcie par des siècles de domination impériale et par un nouveau régime républicain anti-rouges. Yan'an apparaît comme l'objet d'un espoir de régénérescence à l'horizon. Derrière Yan'an, un futur sur lequel plane la mystérieuse brume, mais qui est largement étendu et rouge. En même temps, ce rouge renvoie à un système d'échos. Wu Changshuo est en effet une figure majeur du modernisme artistique chinois, dont la principale caractéristique est d'avoir introduit le rouge comme contrepoint au noir dans la peinture. Cette utilisation du rouge est reprise par de nombreux artistes majeurs, comme Qi Baishi. Cette mise en contact des deux couleurs permet un dialogue visuel fructueux. Ici, si le rouge a tendance à nous sembler plus proche, et le noir plus éloigné, ce qui induit une dialectique entre les deux couleurs. Elles se répondent, s'interpénètrent. Le rouge renverse totalement le statut traditionnel de l'encre noire.

jeudi 6 mars 2014

L'épaisseur de l'oeuvre d'art


Le monde que l'art propose à notre entendement est représenté par l'œuvre, qui concentre la multiplicité et la variété des interprétations mais aussi des émotions. Ces dernières permettent en effet d'assigner telle ou telle signification à l'oeuvre, c'est-à-dire donc de participer à la construction de tel ou tel monde de sens. Selon les significations que le spectateur donne à une œuvre, le monde de sens qu'il partage avec ce support matériel est façonné différemment. Le partage peut alors se comprendre dans le sens d'une association : les spectateurs dans leur ensemble se partagent la tâche de construire le monde donné par l'oeuvre, le monde à la base duquel est l'oeuvre. C'est-à-dire que celle-ci est la fondation matérielle d'un monde de sens, construit par le croisement entre le dialogue de l'oeuvre à l'individualité et l'addition des nombreuses, peut-être innombrables, réactions différentes face à l'oeuvre. C'est la conjugaison, l'association de ces interprétations et ressentis face à l'oeuvre qui donnent sa profondeur et son intégrité au monde de sens engendré par les dialogues d'une œuvre avec ses spectateurs, auditeurs, lecteurs. Par conséquent, il faudrait voir le monde donné par l'oeuvre d'art comme un monde en plusieurs dimensions, quadrillé par les interprétations et les relations de communications oeuvre-spectateur permettant de parvenir à de nouveaux sens enrichissant ce monde.
Par exemple, Jacques Darriulat dans son essai De l'interprétation de l'oeuvre d'art, donne à comprendre les différentes recettes théoriques à disposition pour interpréter, traduire une œuvre. Il y aurait une conjugaison notamment entre deux regards sur l'oeuvre : d'un côté l'herméneutique de l'oeuvre d'art recherche sa signification objective, en s'appuyant notamment sur l'iconographie, la connaissance savante des symboles, et sur l'iconologie, la recherche d'une signification (un message) que porterait l'oeuvre. D'un autre côté, la phénoménologie de l'oeuvre d'art s'attache à « penser que toute la beauté de l'oeuvre est contenue dans l'acte de sa manifestation, dans sa pure présence sensible ».  Une même oeuvre soumise à ces divers regards théoriques s'enrichit déjà de plusieurs couches de sens, proposant à l'entendement une densité que n'aurait pas une oeuvre à l'interprétation univoque.

dimanche 2 mars 2014

Carpeaux et la danse

L'artiste français Jean-Baptiste Carpeaux sculpta ce groupe de danseurs pour la façade de l'Opéra. Il est mis en place avec trois autres sculptures en 1869.
Ce qui eut pour conséquence un scandale immédiat.
Certains pères de famille refusèrent dès lors d'emmener leurs filles à l'Opéra. La sculpture était jugée profondément indécente, correspondant davantage à des lieux peu fréquentables pour la bonne société parisienne.

S'éloignant des conventions académiques, cette oeuvre reflète certaines facettes du romantisme, dont la moindre n'est pas l'excès de vie qui s'en dégage.

Un premier élément apte à gêner la société bien pensante est la nudité des personnages, une nudité affichée et fière. Il ne s'agit pas de corps académiques à contempler simplement, mais de corps qui jouissent d'eux-mêmes. La ronde permet au sculpteur d'envisager toutes les postures, toutes les façons d'exprimer le plaisir du corps en mouvement. Les deux femmes sur le devant montrent à elles deux au spectateur la totalité du corps féminin. Celle de gauche dévoile le buste, cachant son intimité d'une jambe faussement pudique (la pudeur est contredite par le plaisir de la tête rejetée en arrière) participant au mouvement global. Celle de droite montre l'arrière du corps, les jambes pliées soulignent la présence des fesses pour le spectateur en contrebas. D'autant plus que son visage ravi est tourné vers l'extérieur, comme si elle cherchait à jauger de son effet et en riait.

La femme sur la gauche, plus introvertie, ferme la ronde. A ses pieds, un masque de la tragédie fait écho à son visage. Pourtant, il s'agit encore d'une monstration du corps en tant qu'objet de jouissances. Sa pose est alanguie contre la façade, son visage est tourné lui aussi vers les spectateurs en contrebas. Si les deux femmes de devant dansent follement, celle qui se cache pourrait être en train d'exécuter un ballet, comme le mouvement de ses bras l'incite à penser. En même temps, les mains s'égarent son son corps gracieux, son sein repose sur le bras de sa voisine.

A part elle, les autres personnage ont le rire en commun. C'est un deuxième élément de scandale. Non seulement les corps s'affichent, mais ils en rient. L'académisme et la religion interdisent le rire, longtemps considéré comme marque de la folie si ce n'est du malin : "Malheur à ceux qui rient, parce qu'ils pleureront !" (Luc, V, 25)
Or, ces personnages rient allègrement. D'une façon presque inquiétante.


La femme qui se tient dans l'ombre, derrière le danseur central, est particulièrement ambiguë : que traduit véritablement l'expression de son visage ? S'agit-il de joie partagée avec le reste du groupe, ou d'un sourire sournois ? C'est la seule femme habillée, son ventre semble gonflé, son sein droit est dénudé. Est-elle le répondant du Cupidon caché entre les jambes des danseuses ? Après l'amour et la jouissance, la grossesse. Le visage surpris d'une jeune fille derrière le danseur central émerge à peine de l'ombre, au-dessus de l'épaule de la femme.

Boadicée


La reine Boadicée (Boadicea, Boudicca), est un personnage du folklore britannique. Bien qu'elle ait existé, la plupart des informations à son sujet relèvent de la légende. Au premier siècle de notre ère, cette femme de roi, de la tribu Iceni, s'est levée pour combattre les envahisseurs romains. 

Les sources
Le sénateur et chroniqueur Dio Cassius donne un premier portrait de Boadicée : elle serait, comme toutes les femmes galloises, grande, fortement charpentée, avec un air maussade et une longue chevelure rousse. Sa voix est particulièrement décrite comme grave et rude, une voix rauque d'homme, reflet du rôle non-féminin qu'elle cherche à remplir.
L'historien Tacite, contemporain de Boadicée, lui prête une naissance royale dans le comté actuel d'East Anglia. Elle est la mère de deux filles et la femme du roi Prasutagus qui laisse, à sa mort, la moitié de son royaume aux romains et l'autre moitié à ses filles, donc à sa femme régente. Mais le représentant de l'empereur sur place, Catus Decianus, ne se satisfait pas de ce partage et ordonne à ses troupes d'envahir le territoire d'autres nobles britanniques en provoquant le plus de carnages possible afin de briser la fameuse fierté du peuple Iceni. La famille que laisse Prasutagus subit sa part de violence : Boadicée est fouettée en place publique et ses filles sont violées. Les extraits ci-dessous sont tirés du livre IV des Annales de Tacite.
Ses propriétés (à Prasutagus) furent ravagées par les centurions; les soldats pillèrent sa maison, et ses effets furent saisis comme butins de guerre. Sa femme, Boudicca, subit l'humiliation de cruels coups de fouet ; ses filles furent violées, et les plus illustres parmi les Iceni furent forcés de renoncer aux statuts qui leur avait été transmis par des générations d'ancêtres. La région entière était considérée comme un héritage légué aux carnassiers.
Ces brutalités rallient les populations, c'est-à-dire sa propre tribu et d'autres, derrière la reine.
Les tribus voisines, qui n'avaient pas encore appris à ramper sous les fers, se jurèrent, au sein de conseils secrets, de se dresser pour défendre leur liberté.
Vitrail du Colchester Town Hall
Boadicée et son armée de 120 000 hommes parviennent à récupérer Londonium. Alors que le général romain Suetonius prépare sa contre-attaque pour lui reprendre la ville, la reine prononce un de ses trois fameux discours, retranscris par les chroniqueurs. Celui-ci lui est attribué par Tacite :
Boudicca dans son char, avec ses deux filles devant elle, roula dans les rangs. Elle harangua les différentes tribus de cette façon : "Ce n'est pas la première fois que les Britanniques sont menés au combat par une femme. Mais aujourd'hui elle n'est pas venue pour afficher l'orgueil d'une ancienne lignée, pas plus que pour récupérer son royaume et la richesse familiale qui lui a été volée. Elle s'engage sur le champ de bataille, comme la plus petite d'entre elles, pour affirmer la liberté de tous, ainsi que pour venger son corps lacéré par les ignobles coups de fouet et ses deux filles horriblement violées. Pour les Romains orgueilleux et arrogants, rien n'est sacré ; tout peut être profané ; le vieillard endure le fléau, et les vierges sont déflorées. Mais à présent les dieux vengeurs sont proches. Une légion romaine a osé affronter les Britanniques guerriers : ils paieront leur imprudence de leur vie ; ceux qui survivront au carnage d'aujourd'hui seront ceux qui seront restés couchés derrière leurs retranchements, ne pensant à rien sauf à sauver leur vie par une fuite ignoble. En entendant le vacarme alors que nous nous préparons, en entendant les cris de l'armée britannique, les Romains reculent de terreur dès maintenant. Comment se sentiront-ils quand le moment de l'assaut sera venu ? Regardez autour de vous, voyez comme vous êtes nombreux. Regardez le fier étalage de ces esprits guerriers, et pensez aux motifs qui nous font brandir l'épée vengeresse. Ici, nous devons conquérir ou mourir avec honneur. Il n'y a pas d'alternative. Bien qu'étant une femme, ma décision est prise : les hommes, s'ils le préfèrent, peuvent toujours survivre avec la honte et dans l'esclavage."
Boadicée haranguant les Britanniques,
gravure de William Sharp d'après la peinture de John Opie,
1793, National Portrait Gallery

samedi 1 mars 2014

Delacroix et Faust

En 1925, Delacroix voyage à Londres et assiste à une représentation de Faust. D'après sa correspondance, celle-ci l'a beaucoup marquée. Il s'aperçoit des possibilités graphiques qu'offre ce mythe, hautement romantique. Le Mal y acquiert une profondeur particulière. Dès 1828, Sautelet publie une édition française du Faust de Goethe illustrée par 19 lithographies de Delacroix. Voyant celles-ci, l'auteur germanique lui-même exprime son admiration : "Mr Delacroix a surpassé ma propre vision, et les lecteurs trouveront tout ceci bien plus vivant et de meilleure qualité que tout ce qu'ils ont pu imaginer" (Conversation entre Goethe et Eckermann).
Méphistophélès dans l'étude de Faust, Delacroix, 1827-28, Wallace Collection (London)
Cette grande peinture montre le moment crucial : le sujet de la toile est autant l'apparition du démon que le pacte en lui-même. La scène est hautement théâtralisée, comme le souligne la toile rouge sur la droite, véritable rideau. La gestuelle est également très marquée, les visages et les postures sont très expressifs. La main levée de Faust montre sa prétention à contrôler l'être en face de lui, son orgueil devant les pouvoir qu'il croit être désormais les siens. Méphistophélès, quant à lui, a le privilège de la taille et le regarde de haut. Nulle peur sur son visage, ses yeux sont étroits et devraient inspirer la méfiance. Sa main droite est une menace, posée sur le pommeau de l'épée, mais il désigne en même temps une tache blanche sur son sein. Sans doute une page, que Faust doit signer pour que le pacte soit scellé. Le menace est sensible non seulement dans le personnage de Méphistophélès, mais aussi dans l'encombrement hasardeux au-dessus des deux contractants. On a peine à comprendre comment cet entassement peut tenir en équilibre, l'étagère pourrait se rompre à tout moment et écraser le petit Faust, dont le bras levé peut aussi être compris comme une tentative de se protéger. Sur l'étagère, on peut notamment distinguer un crâne, un sablier... Autant de symboles classiques utilisés dans les vanités, et qui répondent au grand miroir encadré d'or derrière Méphistophélès.

Mais si Delacroix utilise ici la couleur, jouant surtout avec le rouge et l'obscurité, ses lithographies représentent les scènes du mythe d'une autre façon.
Première rencontre entre Faust et Marguerite, 1828, Delacroix

La technique de la lithographie permet à Delacroix d'insister sur le dialogue entre lumière et obscurité. Ce qui répond à l'antinomie bien / mal, au coeur d'un mythe comme celui de Faust. Cette image montre ainsi que la tendre Marguerite est principalement en blanc, tandis que Méphistophélès à droite est tout en noir. Faust, quant à lui, n'est que partiellement gagné par le mal. On pourrait penser qu'il ne s'agit que d'un jeu d'ombre. La vierge sculptée étant dans l'obscurité, Méphistophélès est de même obscur parce qu'il serait également dans l'ombre, non touché par le soleil. Cependant, on peut remarquer que son ombre est visible. Il est donc en plein soleil, mais reste ténébreux.


Méphistophélès dans les airs, 1828, Delacroix